Roland Reumond
La vie, c’est cette corde raide, tendue entre l’enfance avec l’éveil des sens, et la nuit des sens qui est celle du grand âge; c’est comme une corde à linge, au soleil dans le vent doux, pour accrocher les images, sécher les moments tristes, aérer les regrets, redonner formes aux souvenirs et des couleurs à la grisaille des jours.

Sans trop de nostalgie, il faut savoir recouvrir la mémoire, comme on récupère une partie de soi-même qui était perdue, comme on s’ouvre au passé pour reprendre possession de ses pensées et de ses biens les plus précieux.

La lumière et le zéphyr nous y convoquent !

Retrouver la mémoire, comme on recouvre la santé, et des forces pour aller plus loin ; ou la raison, après un moment de profond désespoir.

Oui, dans le souffle et la chaleur, il nous faut recouvrir la mémoire comme on retrouve la vérité d’être libre et la liberté d’être authentique.

Quand on se transpose à l’époque de nos dix ans, il y a de cela, dans la coquille des roudoudous, des bonnes saveurs et des plus amères, des plus tièdes et des douches froides.

Sans mettre le nez dehors, nous pouvons constater que la vie est pleine d’accros, c’est bien connu des déchirures et des blessures de l’âme ; mais la nostalgie de l’enfance et ses bons souvenirs sont une forme de pied de nez que l’on fait aux épreuves, aux incontournables examens auxquels nous sommes régulièrement soumis.

Il y a toujours des croche-pieds qui vous ont fait tomber à terre, des claques de vie, comme il y a des accroche-cœurs qui vous ont réchauffé le cœur et vous ont élevé au septième ciel.

Alors, accrochez-vous à ces derniers, nul croc en jambes ne pourra jamais vous en fera choir !


(Extrait de Veilleurs de Dhuis)